Né du mariage artistique entre deux artistes pétris de talent, ‹‹les masques tombent››,un projet qui vise à l’éveil de la conscience noire s’avère révélateur de l’importance de l’art au service de l’histoire des communautés.
Dépouillé de sa substance à cause de la colonisation, de l’esclavage et bien d’autres formes d’inégalité doit-il avait fait l’objet et auxquels il continue de se soumettre, l’homme noir semble ignorer son histoire et est perdu dans une multitude de culture.
Aujourd’hui, avec la question de la restitution du patrimoine noir, il urge de faire connaître l’histoire, la vraie à toute l’humanité et surtout amener le peuple noir à se connecter avec son identité à travers les ‹‹masques qui vont tomber››. C’est cette mission de conscientisation, d’éveil et de reconstitution de l’histoire noire que se sont donnée ces deux jeunes artistes africains à partir d’une rencontre en France avec le concours d’un promoteur artistique, Patrick Gufflet également séduit par le projet. Le premier est togolais, plasticien connu sous le nom de Clay Apenouvon et l’autre camerounais, danseur chorégraphe et performeur répondant au nom de Zora Snake. Dans un entretien exclusif, ils nous expliquent le sens réel des ‹‹masques››, les non-dits de ses ‹‹objets-sujets››, leurs vraies valeurs et ils dévoilent les contours de ce projet qui ambitionne de raconter le passé glorieux d’un peuple dont l’identité n’est plus que souvenir et nostalgie.
Qui sont Clay et Snake et que peut-on entendre par ‹‹Les masques qui tombent››
Nous sommes Clay Apenouvon, artiste plasticien, togolais et Zora Snake, danseur chorégraphe et performeur camerounais. Nous sommes les initiateurs du projet ‹‹ Les masques tombent››.
Il s’agit d’un projet artistique né de la rencontre entre deux artistes, un plasticien (Clay Apenouvon du Togo) et un danseur chorégraphe performeur (Zora Snake du Cameroun).
Comment va se dérouler ce projet dans la mesure où vous n’êtes pas du même domaine de l’art ?
L’œuvre plastique et la danse seront comme deux corps qui jouent ensemble, s’interpellent, s’entremêlent, se répondent pour ouvrir un autre regard sur ‹‹Les masques tombent››.
La présentation de cette performance se déroulera devant un public entourant l’espace scénique qui sera partie prenante du déroulement des ‹‹Masques tombent››.
On verra un être qui bouge et essaie d’entrer en contact avec trois sculptures, effigies représentant symboliquement les êtres qui habitent ces dites œuvres d’art africaines qui peuplent les musées du monde entier. Mais en réalité, ce ne sont pas des œuvres d’art mais des êtres sujets déplacés de leur espace essentiel.
D’où vous vient l’idée de l’appellation dudit projet ‹‹Les Masques tombent›› ?
En premier lieu, ce que nous appelons les sujets présents dans ces musées sont pour une bonne part constitués de masques. Ce titre est sans doute une injonction. Que ces masques quittent le statut qu’on leur a affublé « d’œuvres d’art africaines ». Les masques tombent car par notre travail, doit apparaître, se révéler leur véritable statut. Un dévoilement à la fois aux yeux de ceux qui les ont pillé sur notre continent comme des « valeurs » à conserver comme aux yeux de nos frères qui ont oublié la puissance de ces objets-sujets qui sont en réalité des ancêtres qui doivent revenir sur leur terre originelle.
Dès lors, il ne s’agit plus des « masques » contemplés dans les musées au sens premier du terme, mais des non-dits de notre histoire commune donc nous partageons les mêmes valeurs.
En quoi le passé est-il intéressant dans la vie d’un être et en particulier pour un homme noir?
Du fait de l’omnipotence des pays du Nord que nous subissons en toutes choses et chez nous de l’oubli coupable de nos glorieuses heures passées, il est nécessaire de proposer une interrogation sur ce qui a constitué l’histoire et la culture de nos peuples. Le passé est le socle de notre avenir.
Un avenir unique, propre, singulier qui ne ressemblera qu’à nous-mêmes, hors de toute imitation.
Quel est ce poids du passé dont vous parlez et en quoi l’art peut-il contribuer à « soulever » ce poids ?
Les passés de tous les peuples pèsent quelque chose. Les occidents n’oublient jamais ce qu’ils doivent aux Grecs et aux Romains. Nous devons donc reconsidérer la puissance de notre passé avant que les peuples du Nord ne viennent nous coloniser, et se chargent de nous écarter de tout ce qui constitue notre passé.
Quel est le contenu du Mémoire (l’œuvre) « Les séquelles de la colonisation« ?
Quatre (04) chapitres constituent ce mémoire. On peut dire que le 4e est la synthèse. Le chapitre 1 traite du rapport des religions venus du Nord confrontées aux pratiques traditionnelles qui représentent notre socle culturel. Le 2e pose la question du patrimoine africain qui séjourne dans les musées du Nord. Le 3e interroge le rapport entre le monde virtuel « orchestré » par le Nord qui sert d’espace de vie à la plupart des jeunes générations et le monde réel, organique qui révèle notre différence, nous Africains.
Quelles sont les différentes phases de ce projet ?Et comment se fera la restitution entre âme Togo et le Cameroun.
Après une période de réflexion entre les deux artistes, un premier temps de construction se déroule actuellement à Lomé qui sera suivi d’une 2e étape, toujours à Lomé. Puis les deux artistes se retrouveront en Europe, à Paris et Bruxelles pour finaliser cette œuvre hybride.
Il faut savoir qu’à la suite de cette première étape, une restitution « work in progress » sera présenté le samedi 16 à l’Institut Français du Togo à 16h.
La 4e étape, la dernière, se fera en Allemagne, en novembre 2021, à Berlin avant de revenir sur le continent, juste après, pour la 5e édition du Festival Modaperf.
Quel est le public cible ?
Entre performance et exposition, ce double dispositif s’adresse à toutes sortes de publics. La présence puissante du corps du danseur dans un rapport très direct avec le public s’adresse à tous ceux qui restent sensibles au rituel.
Ici, la confrontation, la cohabitation entre des êtres symbolisés et un corps vivant.
Aux publics qui pourront se confronter directement à l’œuvre plastique du sculpteur.
Merci Clay et Snake et bon vent au projet ‹‹Les masques tombent››.
C’est plutôt nous qui vous remercions.
l’Emissaire