Aujourd’hui, après plus de 60 ans d’indépendance du Togo, même s’il y a eu quelques avancées, les discriminations et injures entre ethnies et communautés continuent de déchirer le tissu social togolais. Certaines personnes continuent de se croire différentes ou même supérieures aux autres au point d’interdire le mariage entre leurs enfants et ceux d’autres origines ou régions du Togo. Pour essayer de cerner un peu le phénomène, votre presse en ligne l’Emissaire a effectué un micro-trottoirs pour vous. Suivons les réactions et les témoignages des uns et des autres.
Mèhèza : Personnellement je draguais une fille ( Aïcha), on a avancé dans la relation . Mais j’ai fait demi tour parce qu’on me demandait de devenir Musulman. J’ai constaté aussi que les musulmans ne se marient qu’entre eux.
Ayélé: Si le gars quelque soit son origine ethnique ou religieuse peut prendre soin de ma fille c’est tout bon. Si c’est mon fils, pas de discussion, qu’il prenne celle qu’il desire, c’est mieux qu’être non-hétéro.
Boga: C’était avant qu’il y avait cette histoire de discrimination liée à l’ethnie. De nos jours, quelques rares personnes ont toujours cette sale habitude. Dans le cas où un chrétien veut prendre pour épouse une musulmane, la famille de celle-ci lui impose de se convertir à la religion de leur fille. Sinon, si les 2 intéressés sont dans la même religion, ça marche sans problème. De même, deux personnes d’ethnies différentes mais musulmanes peuvent se marier très aisément sans complication. Aussi si vraiment une fille aime un garcon, la décision finale lui revient quelque soit l’opposition. Si elle rentre avec une grossesse de son amoureux, ses parents ne pourront plus rien et comprendront c’est celui que le coeur de leur fille a choisi. Parfois celui que les parents veulent imposer n’apporte pas la paix à leur enfant et ce sont des regrets plus tard.
Laté: En tout cas je ne sais pas comment ça s’est fait entre mes parents mais mon papa est d’aného et ma maman est cotocoli de bafilo! Je n’ai jamais eu écho d’une quelconque opposition contre leur union! En fait tout dépendra de la fille et du garçon ! Les deux ont leur part de responsabilité sinon ça ne marchera jamais ! Une chose est sûre si t’es un homme et tu veux d’une femme qui n’est pas de ta religion mais que tu aimes sérieusement, tu prends tes responsabilités et tu le démontres vis à vis de ta famille! Si ça marche de ton côté, t’as gagné au moins 70% de la bataille! Reste à savoir si la fille peut faire de même. Mais il ne faut pas ignorer que les gens de la même ethnie et religion peuvent être confrontés aux difficultés. Par exemple, collègue de boulot ( Cotocoli musulman pratiquant) qui 35 ans s’est vu refuser son union avec sa copine (Cotocoli musulmane pratiquante) sous prétexte que les deux familles avaient eu des conflits par le passé ! C’est honteux au 21e siècle hein ! J’ai aussi une collègue au boulot, elle est de Mango (nord Togo). Son papa lui a dit tout récemment qu’elle et ses sœurs n’épouseront jamais un homme du sud! Elles sont 4 filles. J’ai juste souhaité une bonne bataille à elles et leur papa. Cette situation est récurrente à 80% malheureusement ! Dieu merci il y a quelques jeunes qui s’y opposent ! Chers jeunes prenez vos responsabilités quoi!
Médjago : nos parents n’ont quand même pas tort hein. À part les made-in-Lomé, la plupart des garçons et filles qui ont grandi dans leur communauté d’origine ont toujours quelques particularités pas vraiment interessantes. L’hypocrisie niveau supérieur reigne en maître chez eux.
Ouro: moi j’ai rencontré une fille d’aného. Elle m’a raconté que quand elle était en cours primaire (CM1 environ), un mercredi après-midi, son père l’a appellée elle et sa grande-soeur pour une réunion familiale. Leur papa leur a donc affirmé ceci: “bientôt, vous serez des femmes, vous pouvez tout me ramener comme garçons à la maison, sauf les hommes du nord”.
Kokoèvi: l’ethnie et la religion ne définissent pas une personne. Le plus important, c’est de savoir si cette personne a la crainte de Dieu. A t’elle de la considération pour l’homme ou l’humain? A t’elle du respect pour ses parents? Quelle place cette personne donne à son/sa conjoint.e? Quelle vision a t’elle de leur avenir ensemble? Ce sont les réponses à ces questions qui vont déterminer le rejet ou l’acceptation de cette personne. Je suis par ailleurs consciente que certains ne tolèrent pas du tout le mariage inter-ethnique ou interreligieux. J’en suis témoin, et personnellement, il y a certains individus, je me vois mal en couple avec eux vu leurs origines. Toutefois, je suis toujours ouverte à aller au delà des préjugés.
Nous voici donc arrivé à la fin de ce micro-trottoirs avec tous ces propos recueillis sur l’état des lieux des perceptions des togolais sur le mariage interethnique ou interreligieux entre les enfants d’une même nation. Les questions à se poser sont: pouvons-nous bâtir un avenir commun et un Togo digne, en continuant à nous discriminer les uns les autres? Que doit faire la société dans son ensemble pour endiguer ce phénomène qui déconstruit le vivre-ensemble? Quelle responsabilité doivent prendre les jeunes particulièrement? Jeunesse, la balle est dans ton coin!
Par Djamiou A.