Jacob Desvarieux, membre fondateur du groupe Kassav’ et auteur du tube Zouk la sé sèl médikaman nou ni, s’est éteint. L’artiste de 65 ans avait été placé dans un coma artificiel après avoir été testé positif à la Covid-19. Il ne s’est malheureusement pas réveillé.
Le zouk a perdu un de ses plus grands talents. Jacob Desvarieux, cofondateur du mythique groupe antillais Kassav’, s’est éteint ce vendredi 30 juillet à l’âge de 65 ans, selon une information de Guadeloupe la 1ère. L’artiste avait été testé positif à la Covid-19 après un examen de routine à l’hôpital de Pointe-à-Pitre le 12 juillet dernier. Placé en réanimation, plongé dans un coma artificiel, le chanteur faisait partie des personnes les plus à risque face au coronavirus : diabétique, il avait été greffé d’un rein en 2008. Une opération qui était à l’époque devenue nécessaire, après 10 ans de lutte contre la maladie. « Si je ne trouvais pas une greffe de rein, j’allais vivre très difficilement jusqu’à la fin de mes jours, voire mourir », avait-il confié à KTO en 2020. Sauvé par cette greffe, il avait alors invité les personnes prêtes à donner leurs organes à faire part de leur souhait à leurs proches. C’est grâce à cela que Jacob Desvarieux a pu se produire 13 ans de plus sur scène et continuer à donner du bonheur au public avec ses amis de Kassav’ ou d’autres formations.
Né à Paris, Jacob Desvarieux a grandi entre la Guadeloupe et la Martinique et commencé très tôt à jouer de la musique. Après avoir écumé les scènes avec des petits groupes, c’est à la fin des années 70 qu’il a trouvé ses camarades de route : Pierre-Edouard Decimus, grande figure de la musique antillaise, lançait alors un nouveau groupe avec son frère Georges Decimus et Freddy Marshall. Ensemble, les quatre hommes ont formé Kassav’, dont le premier album est sorti en 1979. La chanteuse Jocelyne Béroard a rejoint la formation en 1980, puis bien d’autres artistes sont venus les rejoindre, dont Patrick Saint-Eloi, emporté par un cancer en 2010. Souvent simplement connu en tant que groupe, Kassav’ est en réalité bien plus que cela : c’est une formation mouvante, dont les membres sortent régulièrement des albums en solo. Au total, près de 80 disques sont sortis, si l’on compte ceux de tous les membres de Kassav’. Parmi eux, le fameux Yélélé, un des cinq albums de Jacob Desvarieux. Sorti en 1984 et enregistré avec Georges Decimus, il contient un des plus grands tubes de la formation, Zouk la sé sèl médikaman nou ni.
Souvent considérés comme les fondateurs du zouk, les artistes de Kassav’ ont connu un succès mondial qui les a amenés en Afrique, aux Etats-Unis, au Japon et même, à une époque où cela existait encore, en URSS. « On a un public, je peux vous dire que c’est le meilleur public du monde. Parce qu’ils nous soutiennent depuis 40 ans, sur plusieurs générations. Et quand on voit un concert de Kassav’, c’est là qu’on voit l’importance du public », déclarait avec émotion Jacob Desvarieux en 2019 sur France 2, à l’occasion du concert des 40 ans de Kassav’ à Paris La Défense Arena. Pilier de cette formation, le chanteur a aussi connu des succès au sein d’autres projets, dont le disque très populaire Dis l’heure 2 zouk sorti en 2003. Jacob Desvarieux avait fait entendre sa voix sur deux tubes issus de cet album : Laisse parler les gens, avec Jocelyne Labylle, Cheela et Passi, et Ma rivale avec Lynnsha et Lady Sweety.
Les rares fois où il n’était pas sur scène ou en studio, Jacob Desvarieux a pris le temps d’explorer un autre art : celui de la comédie. Acteur dans un épisode de Femmes de loi, apparu dans deux courts-métrages, il avait eu un petit rôle dans la série The Young Pope, où il incarnait un cardinal. Officier de l’Ordre National de la Légion d’Honneur et officier des Arts et des Lettres, Jacob Desvarieux restera toutefois essentiellement reconnu comme un artiste incontournable de la musique antillaise, qu’il a popularisée à travers le globe. Lorsque France 2 lui avait demandé, aux 40 ans de Kassav’, ce qu’on pouvait lui souhaiter de plus après tous ses succès, le chanteur avait livré une réponse touchante : « Que les progrès de la science nous permettent de vivre encore 40 ans pour fêter les 80 ans de Kassav’. » On aurait vraiment aimé qu’elle progresse plus vite.