Quelle est la composition de vos pneus ? Savez vous qu’il existe deux types de caoutchouc ? Le caoutchouc synthétique et le caoutchouc naturel. De plus en plus de pays, en Afrique territoriale et en Asie du Sud-Est investissent dans de grandes parcelles de terre destinées à la production de l’hévéa, une plante utilisée pour créer du caoutchouc naturel.
Le caoutchouc synthétique : Utilisé dès les années 1930 par l’Allemagne puis par les Etats-Unis, alors privés de latex naturel par le Japon, l’élastomère désigne le nom du caoutchouc synthétique. Un terme technique qui se réfère à sa composition chimique (hydrocarbure et liquide chimique). En 2017, plus de 15 millions de kilotonnes de caoutchouc synthétique ont été produits dans le monde. Ce matériau est utilisé dans divers secteurs autres que l’industrie automobile (médecine, sport, alimentation…).
Le caoutchouc naturel : Suite aux Grandes Découvertes, aux alentours du XVème siècle, le latex était utilisé par les peuples autochtones pour créer divers objets (toiles, torches…). Le latex est un matériau issu de différentes plantes telles que l’hévéa et le guayule .Dès le XIXème siècle, le latex est utilisé pour concevoir des lacets, des préservatifs puis des pneus pour les vélos et les motos tels que l’ont proposé les frères Michelin dès 1892.
Dès le XXeme siècle, le caoutchouc naturel sera mélangé à d’autres composants chimiques et l’industrie favorisera progressivement la production de caoutchouc synthétiques au détriment du caoutchouc naturel.
La nature au service de l’industrie
Avec 74 sites de production de pneus au monde, 18 rien qu’en France, c’est chaque année des centaines de millions de pneus qui sont jetés à travers le monde. Chiffres non négligeables lorsqu’on sait qu’un pneu met 400 ans avant de commencer à se dégrader.
L’industrie du caoutchouc naturel en quelques chiffres :
Selon l’association WWF, c’est 15 milliards d’hectares de terre que recouvrent la culture d’hévéa. Plus de 90% de ces plantations se trouvent en Asie du Sud-Est (Inde, Vietnam, Chine..). Alors que plus de 6 millions de petits producteurs cultivent l’hévéa, ce sont les 5 plus grosses industries automobiles qui achètent 20% de la production mondiale de pneus. Le business de la production du caoutchouc est tel qu’il a été reconnu comme étant la principale cause de déforestation au Cambodge.
Le caoutchouc au cœur d’une industrie aliénante et polluante
La production grandissante d’hévéa en Asie est un sujet d’inquiétude grandissant sur le continent. En plus d’impacter les forêts, le caoutchouc, une fois transformé, est utilisé dans la fabrication d’objets généralement non-biodégradables. La question du recyclage entre donc en jeu.
Des organisations européennes telles que l’European Tyre Recycling Association cherchent à développer des voies de recyclage. Toutefois, la réglementation étant stricte, le stockage de ces déchets pneumatiques est souvent délocalisé dans les pays du sud, eux même accablés par leurs propres déchets. En plus de cet aspect, il est important de rappeler aussi que les pneus rejettent d’importantes particules fines non filtrables. Cela contribue à la pollution de l’air extérieur.
Enfin, ces cultures entraînent un accaparement des terres agricoles par les grands producteurs. Les exploitations à échelles locales et la production individuelle par de petits producteurs sont donc moins nuisibles. En effet, elles permettent à la fois des modes de financements plus justes des agriculteurs mais elles limitent aussi la surexploitation des terres et la déforestation massive.
Cette surproduction du caoutchouc entraîne donc différentes conséquences autant sur le plan environnemental que sur l’aspect social et économique des peuples exploités par ces grandes industries.
Des initiatives mondiales…
De nombreuses initiatives ont été mises en place pour lutter contre l’impact de cette surproduction de l’hévéa. Parmi elles, la Déclaration d’Amsterdam signée en 2015 par le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne, le Danemark et les Pays-Bas. L’objectif ? Développer des chaînes d’approvisionnement agricoles sans déforestation. La Déclaration de New-York sur les forêts de 2014, regroupant de multiples acteurs (pays, entreprises, peuples autochtones et ONG), a elle aussi été mise en place pour protéger les forêts
A l’initiative locale…
Au Togo, Sébastien Balouki, créateur de l’association Reboisons Vite le Togo (RVT), fait parti de ces petits agriculteurs qui souhaitent allier économie et environnement. Il a ainsi acheté 9 terrains destinés à ses plantations. Ce dernier lutte contre les décharges sauvages en les transformant en pépinières. Il est aussi très attaché l’agro-écologie. Parallèlement aux sensibilisations qu’il effectue auprès des jeunes et des écoles, il est attaché à un mode de production respectueux de l’environnement mais qui peut aussi répondre à une demande croissante d’emplois au Togo. C’est ainsi qu’il a d’ores et déjà, sur l’espace de six ans, planté une quarantaine d’hectares d’hévéa à travers le territoire togolais dont 10 hectares rien qu’en 2019. Il espère ainsi pouvoir devenir fournisseur pour un grand producteur de pneus.
Sébastien Balouki est toujours en discussion avec certains de ses contacts ivoiriens, déjà fournisseurs d’hévéa pour la marque Michelin. S’il trouve des partenaires, l’argent récolté lui permettra d’embaucher davantage de salariés et de ré-investir dans de nouvelles parcelles de terrain et dans de nouvelles variétés de plantes.
Morgane EYEMIN
Sources :
https://www.wwf.fr/champs-daction/foret/approvisionnement-responsable/caoutchouc-naturel
https://www.aquaportail.com/definition-5623-caoutchouc-synthetique.html
https://www.planetoscope.com/recyclage-collecte/925-nombre-de-pneus-usages-en-europe.html
https://fr.statista.com/statistiques/571644/caoutchouc-synthetique-production-mondiale/
Sandra Ries, Ditte Ingemann, Louise Berggreen, Liv Petersen, Sarah Dieckmann, Sten Rehder et Peter Bengtsen, Behind the rubber label, Danemark, 2013